vendredi 4 juin 2010

Petite


Titre : Petite
Auteur : Geneviève Brisac
Genre : Histoire de vie, littérature adolescente
Appréciation : J'ai adoré

Résumé : Nouk est anorexique. C'est ainsi qu'on nomme sa maladie. Mais la souffrance, comment la nommer ? Le plus grave, c'est peut-être le plaisir inavouable d'être la plus forte, et de mentir, mentir, mentir jusqu'au vertige. Un jour, Nouk est enfermée dans une clinique où l'on s'applique, méthodiquement, à la briser. La jeune fille semble se soumettre. Mais elle reste indomptée. Si elle guérit, ce sera par d'autres voies.

(résumé repris du livre)

Extrait :
Peu à peu les choses deviennent visibles. Peu à peu, les gestes secrets, répétés suffisamment souvent, pendant suffisamment longtemps, sont pris au filet de l'attention de ceux qui vous entourent. Toujours. Je ne sais pas pourquoi. Je ne sais pas quand, ni comment, mes parents m'ont vue.
Il me semble, contrairement à mon professeur d'histoire adorée, qu'ils ne m'en ont rien dit.
Ils n'ont pas dit comme tu as maigri, ma fille. Ni que t'arrive-t-il ? Peut-être ont-ils eu d'autres mots, dont je ne me souviens pas. On écrit avec ce qu'on a oublié. je suis le chemin de ces années à tâtons, ce sont mes petites années noires, je ne me souviens presque pas des faits, je les invente peut-être. Je me souviens des détails, des objets, de gestes, et de mon mal comme si c'était aujourd'hui. En écrivant ces lignes, alors que presque trente ans ont passé, j'ai peur, je le fais parcimonieusement, avec une prudence excessive. Je le fais parce qu'il me semble que c'est nécessaire.
Je ne peux évoquer ces années-là sans peur, ni sans honte, ni sans que mon cœur batte, idiotement, trop fort.
Ils n'ont rien dit. Je peux imaginer qu'ils ont été voir un médecin. Notre fille se tait, évite la table familiale. Notre fille ne mange presque plus rien, elle maigrit beaucoup. Je n'imagine pas qu'ils aient parlé de mes seins qui ne poussaient pas. Des règles qui n'étaient pas apparues, alors qu'elles m'étaient depuis si longtemps promises par ma mère. Elle m'en avait parlé, avec difficulté, je ne pense pas que cela lui était facile. Il était question de coton à se mettre entre les jambes. J'ai vu de ce sang sur les bords de cuvette des toilettes, et je n'en aime pas l'odeur, aurais-je pu dire, dans un monde où j'aurais dit ce que je pensais. ce monde n'existera, je le crains, jamais. Malgré des avancées et des sorties téméraires, à cause de retraites souvent anticipées.
Le docteur est un homme expérimenté, un grand professeur qui a vu des milliers d'adolescentes torturer leurs parents. Il dit qu'il faut des attentions particulières à cette jeune fille, s'en occuper, la rassurer. Peut-être s'avance-t-il sur un terrain personnel, j'en doute. Il donne des fortifiants, de la Frubiose, des comprimés qui donnent faim."

Critique : J'ai beaucoup aimé ce petit livre très bien écrit. Nouk est très touchante, on se place de son côté, elle qui n'écoute pas les gens qui veulent lui faire du bien. Elle les décrit comme des personnages méchants et on est tout a fait d'accord avec elle. On se met entièrement de son côté, tellement elle est touchante, gentille. Même si je ne voudrais jamais au grand jamais devenir anorexique, rassurez-vous ;-) L'écriture est belle, simple, écrite au point de vu de Nouk, passant de la première personne à la troisième. C'est assez étrange mais cela donne un très beau style qui s'écoule parfaitement bien. Un très beau livre qui nous apprend que la médecine n'est parfois pas la meilleure façon pour soigner.

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